La Valeur (aéroport de Varadero)

« Faut-il se sentir coupable d’être « riche » dans un pays « pauvre »? »

– Bruno Blanchet, La frousse autour du monde

Dans l’espace « emboucané » (c’est le moins qu’on puisse dire!) du petit aéroport de Varadero, j’attends le départ de notre vol de retour pour Montréal. Je suis en train de lire les dernières lignes de l’agréable récit de voyage de Bruno Blanchet, mais c’est ce questionnement qui m’occupe l’esprit depuis le premier jour où j’ai mis les pieds ici: est-ce que ma présence en sol cubain en tant que touriste est souhaitée, suis-je la bienvenue ici et surtout, quelle doit être ma position ou ma réaction face à la situation que vivent les gens de ce pays?

Tout le monde en a entendu parler: il est fortement suggéré, lorsque vous allez en vacances à Cuba, d’amener en cadeau à vos hôtes des items pharmaceutiques (aspirines, savon, pâte dentifrice, brosses à dents, serviettes sanitaires…), du matériel scolaire, des vêtements ou chaussures qui ne vous servent plus, des balles de baseball… Combien de fois ai-je entendu dire: « donnez-leur des pourboires à votre arrivée, comme ça vous recevrez assurément du bon service » (!?) Dois-je vraiment considérer et mesurer ma rencontre avec tous ces gens comme une « relation d’affaire »?

J’attends l’avion. Je dois me rendre à la salle de bain, et je constate que la femme qui s’en occupe a environ le même âge que moi. Grossièrement, nous ne sommes pas si différentes toutes les deux: pour sa part, elle s’occupe et veille au bon fonctionnement d’une salle de bain; pour ma part, je m’occupe et veille au bon fonctionnement d’une bibliothèque. Ce qui cloche, vraiment, c’est que je gagne plus d’argent en une heure que ce que cette femme fait en un mois, soit en plus de 170 heures de travail(!)

Le cubain moyen, m’a-t-on dit, gagne environ 300 à 500 pesos cubains par mois (soit environ 12 à 15 CUC par mois). Si, par exemple, je me promène à la Havane avec une caméra numérique valant environ 700$ CAN, je possède donc sur moi un objet ayant la valeur de 3 années entières de travail pour le cubain moyen.

La seule chose que j’ai trouvé à donner à cette femme c’était le paquet de 15 crayons à mine tous neufs qu’il me restait. C’est la deuxième fois que je « reviens » de Cuba, et la deuxième fois que je me dis que je devrais en amener plus, la prochaine fois. Avec le temps et la distance, on oublie… Plongés dans notre quotidien, on oublie aussi qu’il y a de la pauvreté tout près de chez nous… J’espère ne jamais devenir insensible; c’est peut-être l’une des raisons pour laquelle je voyage?

971241-gfN.B. Comme lecture de bord de plage, j’ai adoré La frousse autour du monde de Bruno Blanchet. Ses anecdotes savoureuses (que je n’avais pas eu la chance de lire lors de leur publication dans La Presse), mais aussi ses réflexions sur la nature même du voyage, qui nous transportent dans les îles Fidji jusqu’en Chine, en passant par la Nouvelle-Zélande, la Malaisie, la Thaïlande, le Myanmar et le Laos, en font un excellent livre sur et pour le voyage, à l’esprit libre et léger. À quand la suite?

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2 réflexions sur « La Valeur (aéroport de Varadero) »

  1. Youppi!! 🙂 J’imagine que l’on aura droit à plusieurs tomes… J’hésite par contre à lire ses chroniques hebdomadaires, un peu comme avec 24 heures chrono; j’ai trop hâte de connaître la suite!

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